Un siècle d'escalade à Bleau

Ayant renoncé pour le moment à publier mon livre sur l'histoire de cette forêt qui me tient tant à cœur, je me lance dans l'édition exclusive de ce qui constituait la deuxième partie du projet et du titre : un siècle d'escalade. Je ne sais pas encore s'il sera édité par un grande maison (chat échaudé ...) ou par un autre canal mais la première ébauche est terminé. Merci à tous ceux qui m'ont fait confiance en m'adressant leur témoignage de sympathie mais aussi historique. Sans dévoiler son contenu, voici une première liste des passages de Bleau qui, selon moi, ont marqué l'histoire. A vous de réagir, compléter, corriger... 

En 1908, Jacques Wherlin, un alpiniste parisien qui s'entraînait sur les rochers du Cuvier Châtillon, réussissait la première ascension d'une fissure dièdre qui allait bientôt porter son nom. Un véritable exploit, qui marque les débuts officiels de l'exploration des milliers de rochers de cette forêt aux portes de la capitale. Un peu plus de cent ans après, les grimpeurs de blocs viennent des quatre coins de la planète et poursuivent avec la même passion du grès cette quête de la ligne parfaite.

Car c'est bien cette extraordinaire singularité géologique du Pays de Fontainebleau qui pousse les bloqueurs du monde entier à parcourir des milliers de kilomètres chaque année. En effet, il y a soixantaine millions d'années, la mer déposait ici 30 à 60 mètres d'épaisseur de sable. Un sable d'une pureté exceptionnelle, composé à 98 % de silice et qui va, en différents endroits donner naissance à d'immenses blancs de grès. Il faudra ensuite une pléiade d'événements géologiques hasardeux pour former ces exceptionnels chaos rocheux. Une évolution naturelle qui n'a pas d'égal dans le monde. 

Certes, il y a des milliers de sites rocheux remarquables sur la planète mais nul part ailleurs vous trouverez un grès comme celui de Fontainebleau ! En France, vous avez bien par exemple les remarquables grès d'Annot mais ils n'ont ni la finesse du grain, ni la richesse des formes et des prises rencontré dans notre forêt. Idem pour les blocs de grès rose alsacien ou les superbes sculptures armoricaines. Et si l'on quitte la France, que se soit sur les grès sahariens, italiens, australiens...vous ne retrouverez nul part l'exceptionnelle richesse des grès de Fontainebleau !

D'ailleurs, avec plus de 12 mille passages répertoriés, les grès bleausards constituent sans aucun doute le spot de blocs incontournables dans la vie d'un grimpeur. Il y en a pour tous les goûts et tous les niveaux : du plus haut, la Dame Jeanne de Larchant affichant 15 mètres au plus petit qui fera le bonheur de n'importe quel gamin , du plus extrême, comme Big Island ou le Toit d'Orsay, au plus facile, simple marche sur caillou. 

Dans ce catalogue, choisir les cent plus belles lignes est non seulement impossible mais serait un vrai crève cœur. Toutefois, j'ai décidé de me lancer dans l'exercice mais pour le rendre envisageable, je ne choisirai pas les plus belles mais celles qui me semblent le mieux résumer l'évolution de la pratique de l'escalade à Bleau sur ce siècle.

L'histoire de l'escalade à Bleau a souvent été résumé dans les topoguides et quelques articles publiés ici et là. Cette histoire , n'a retenu que quelques blocs au début du XXe. Cela tient parfois à peu de choses : une anecdote, une petite histoire entre grimpeurs locaux, la personnalité de son découvreur... Alors si souvent ces lignes ont un caractère exceptionnel, ce ne sera pas toujours leur beauté, leur ampleur ou leur difficulté !

Bonne grimpe à tous,
Bleau ardemment

Greg

Un siècle d'escalade c'est :
1908 la fissure Wherlin
1913 L'arrête Larchant
1914 La Prestat
1934 La fissure des Alpinistes
1936 L'angle Alain
1929 1938 la Paillon et Paillon direct
1942 Quartier d'Orange
1946 La Marie Rose
1946 La dalle de la Nescafé
1947 les premiers circuits de l'histoire
1950 La Stalingrad
1950 Carré d'as
1952 4ème angle
1953 La Joker
1957 Le circuit Mauve de la DJ
1960 L'abattoir
1964 circuit saumon TD- des Gorges d'apremont et bleu du Canon
1968 deux nouveaux circuits blancs d'exception 95,2 et Cuisinière Patrick Cordier
1978 Toit du Cul de chien Eddy et Jo
1976 Carnage
1979 Mur des lamentations Guilloux ou Michaud
1979 La Mygale JPB
1983 Berezina ou Abbé Resina
1982 Aerodynamite JG
???? Angle Parfait David Rasouil
1982 L'Etrave PE Alain Michaud ou Lebian
1983 Lucifer 7B jJ
1984 Surplomb de la Mée JG puis MLM en 92 Ben Mon 2007
? Super Prestat 7B+ JM Gosselin
1984 Big Boss David Rastouil JG
Les autres Big du Cuvier Rempart
1985 C'était demain JG
1984 L'aplat du gain 7C+ Alain Ghersen
1987 L'ange Naïf Alain Ghersen 7c+
1987 Partenaire particulier JG et AG
1987 Futurs barbares 7C+ MLM
1987 ? Rubis sur Ongle David Rastouil
???? Arabesque : l'autre toit XX?
1989 Misanthropie 8A JPB
1989 Danse de Printemps 7B+
1990 Sonate d'automne 8B
1989 Valse des adieux 8B JPB
1988 Mouvement perpétuel 1990 Pendule de foucault 8B
1989 Coup de feel 8A+ JG
1989 Golden feet 8A PLD
1988 Coccinelle 7C JPB
1990 Atomic Play-boy 8A+ JPB
1992 L'ange gardien 7C Pld
1992 Raideur digeste 7C+ Pld
1993 Cosa Nostra 7C ratouis
1992 Gospel 7C annoncé 8A Mlm
1992 Karma fred nicole
???? Miséricorde 7C Mlm
???? Reine des bois 7C Manu Marques
1993 Le Duel Pld
1992 Fat Man 8B JG
1992 Enigma PLD
1997 L'alchimiste 8B  MLM  2015 Nalle
1997 Kheops 8B laurent
1997 Dune 8B Toit convention Sf
1997 L'insoutenable légèreté 8B Sf
???? Arête de Boissy
???? Carpe Diem JG et A/R Arnaud Cintre 2001
1993 Encore JG
???? Voyage de Zuong zu traversée 8B Jpb
???? Demonia 7C+ JN
???? Fata Morgana  C Laumône puis assis Sf puis Dave et Dai
???? Big Island 8C VP et DG
Toit d'orsay
A1 JG
A2 JG
A3 Rb
The force 2015 Alban
La force du destin
Jour de chasse 8C+

Appel à contribution

Chers amis et passionnés de la Forêt de Fontainebleau,

Le livre est en phase de correction par Dominique... Un gros, très gros travail car en plus de mes nombreuses fautes, redites..., elle doit alléger l'ensemble du manuscrit d'un tiers de son volume initiale. Courage Dom' !

En attendant, je poursuis la sélection de photographies et autres illustrations. L'occasion pour moi de faire appel.

En effet, il existe très peu d'images inédites de l'escalade à Fontainebleau de 1908 à 1980. Vous avez sans doute déjà tous vus celle de Pierre Alain sautant du haut du bloc de la Brioche.

Nous cherchons donc des images originales ou peu diffusées comme par exemple cette photo de Guy Poulet dans un surplomb du Cuvier Châtillion datant de 1947.

Si vos grands parents, parents ou vous même avez fréquenté cette forêt au XXe, vous avez peut être quelques souvenirs à partager avec nous.

Bien entendu, cet appel ne se limite pas aux photos d'escalade !

Randonnées, bivouacs, trajets en trains ou même documents publicitaires de l'époque précieusement conservés dans vos archives familiales sont devenus au fil des ans autant de trésors susceptibles de nous intéresser.

N'hésitez donc à me contacter en écrivant à latribunelibredebleau@gmail.com (réponse assurée), me faire parvenir un scan de ces témoignages et pourquoi pas, à me livrer vos souvenirs et anecdotes.

Soyez assurés que nous en prendrons le plus grand soin et ils vous seront très vite restitués.

Bleau ardemment

Grégoire

Pierre Alain et sa bande de Forçats sur le bloc de la Paillon


Petite histoire des carrières

Nul besoin d'être un grand observateur pour trouver dans le massif forestier de Fontainebleau et ses satellites des traces de la présence des carriers ! Si les grimpeurs imaginent souvent le nombre de beaux rochers qu'ils ont réduit en pavés, on peut quand même les remercier pour quelques très beaux passages que nous leur devons. En complément d'une visite du sentier de découverte dont parlait la TL2B, des films et de quelques rares témoignages sur ce dur métier, nous vous proposons de revenir sur un excellent article écrit par Didier Roger avec la complicité de Thierry Szubert et de bien d'autres amis de la forêt tels que Ghyslaine, Jean-Pierre, Emmanuel et Christine. Nous l'avons un peu transformé. Ce patrimoine des carrière fait l'objet de toute l'attention de nos amis de l'AAFF qui a d'ailleurs une Commission spéciale sur le sujet !

Aujourd'hui, c'est avec une certaine nostalgie que nous croisons les nombreux vestiges de ce passé industriel. Sous leur épaisse couche d'humus et de mousse, on devine bien encore, ces murs, ravelins ou chaises d'écales, ces gros blocs de rochers débités en boites à coins et encore debout, ces vieux chemins d'accès en pentes avec leurs remblais, et ces refuges de pierres. Ils nous semblent toujours attendre le retour improbable des ouvriers qui les ont abandonnés un jour de 1907 ou de 1983...

Il faut parfois beaucoup d'imagination pour deviner qu'en ces lieux aujourd'hui si paisibles, il n'y a pas si longtemps encore, tout n'était que chaos indescriptible. Le paysage y ressemblait à un champ de bataille de la première guerre mondiale, lardé de tranchées et labouré de trous d'obus. La végétation y avait disparu, les roches étaient à nu, défigurées, bouleversées méthodiquement, sous les coups précis et assourdissants des grosses masses des carriers frappant les coins de fer dans les blocs ou par les terribles détonations des mines explosant les roches. Et l'on se prend à croire que si tout cela avait pu perdurer impunément, la forêt de Fontainebleau ne serait peut-être finalement plus de nos jours, qu'une platitude forestière, jonchée d'amoncellements de cailloux et parsemée de crevasses... 
Ancien abri de carriers détruit par le passage des engins forestiers !

Histoire d'une industrie disparue :


On a évoqué la géologie du site et ses bancs gréseux de différentes duretés. Au XIIe siècle et pour de longues années encore, les voies de communication française sont constitué de chemins boueux, pierreux ou chaotiques. Dans Paris, comme dans les autres villes, Ies chaussées n’étaient pas pavées, sauf pour quelques rares axes principaux ou sur certains carrefours. Le plus souvent, les rues étaient recouvertes d’une simple couche stabilisante, constituée d’un mélange de terre, d’argile, de sable et de caillasse, parfois complétées par des rigoles axiales en pierre. De plus, les intempéries et le "tout à la rue" provenant des maisons qui les bordaient, se déversant à même la chaussée, les inondaient, puis les transformaient en véritables bourbiers impraticables et nauséabonds. Sous le règne du roi Louis XIII, la moitié seulement des rues de Paris étaient pavées. Il fallut attendre le courant du XIXème siècle pour qu’elles soient -enfin- toutes pavées et doublées de conduits d’évacuations des eaux usées, par des égouts souterrains !

Si quelques pavés ont donc été retiré de la forêt avant le XIIe, ne serait-ce pour la construction, cette exploitation n’est attestée cependant pour la première fois qu’en 1184, par une Ordonnance Royale qui autorisait -sous certaines conditions- l’ouverture par adjudications, de carrières en certains lieux du massif, là où se trouvaient des bancs de grès. Cette Ordonnance précédait un Édit promulgué un an plus tard par le roi Philippe-Auguste, exigeant le pavage de toutes les rues de Paris.

Ce besoin de pavage, mais aussi la construction de bâtiments, de ponts, et l'amélioration des routes permit de faire vivre des générations de carriers et leurs familles durant plusieurs siècles dans tout le Gâtinais Français.
Ouvriers dans une carrière de Fontainebleau
Le Pifomètre

Dans la vallée de l'Essonne et le massif forestier de Fontainebleau, on trouve principalement du grès de type dit "blanc", c'est à dire composé de silice très pure. Ce grès était divisé en trois qualités différentes : le célèbre "pif", "paf", "pouf" correspondant au pifomètre des carriers. Ces dénominations proviennent du son que la roche émet lorsqu'elle est frappée :

Le grès "pif" est le plus dur. Il est dit "vif" ou "noble". Il servait principalement à la construction de bâtiments. On le trouve notamment dans le massif du Mont Ussy, dont les pierres servirent à construire le premier château de Fontainebleau, et certaines parties de l'édifice actuel, notamment : le grand escalier, les linteaux des portes et des fenêtres ou le pavage des cours. C'est un des plus difficile à travailler.Le grès "paf", ou "franc" est le plus courant dans le massif de Fontainebleau. De très bonne bonne qualité, il était utilisé pour les constructions et le pavage.

Le grès dit "pouf" dit "maigre" ou "mou" est très mauvaise qualité, car insuffisamment solidifié. C'est notamment celui que l'on trouve dans le sud de la forêt, notamment à Larchant. Il peut se retrouver très friable par endroits. Il n’était utilisé que pour l’édification de murs de délimitation, de bordures de trottoirs ou pour le pavage de voies secondaires.

Il existe également une quatrième qualité de grès -assez rare dans la région- appelée "royale". Ce grès, qui a la propriété d'être à la fois tendre et ferme, est idéal pour la réalisation de sculptures.

L'âge d'or


L’exploitation des carrières de Fontainebleau s’intensifia considérablement à partir des XVIe et XVIIe siècles ; dans un premier temps uniquement autour de la ville d’Avon. Puis, devant la demande importante, elle s’étendit petit à petit dans l’ensemble du domaine, d'abord essentiellement dans les chaos rocheux puis sur les platières. A partir de la fin du XVIIIe siècle et au début du Premier Empire, les carrières s'étendent au Sud de la ville de Fontainebleau (Haut Mont, Rocher Boulin...) devant le besoin sans cesse croissant de pavés pour la capitale.

L'industrie arriva à son apogée dans les années 1840. On comptait alors -selon les sources- entre 1000 et 2000 ouvriers permanents et saisonniers (journaliers, fermiers, bûcherons...) dans tout le massif. Les carrières étaient si nombreuses, que l’on ouvrit alors de nouvelles veines dites "ouvertes" situées sous l’humus du tapis forestier, au dessous des platières, mais aussi dans la plaine forestière. Les carriers extrayaient à cette époque entre trois et quatre millions de pavés par an, qui étaient ensuite déposés sur des tombereaux, et conduits en des points de stockage. Puis ils étaient chargés sur de lourds charrois et acheminés sur des routes pavées (dont certaines sont encore visibles), principalement à destination du port de Valvins à Fontainebleau et de celui du port dit des "Pavés de la Cave" à Bois-Le-Roi. De là, ils étaient transbordés sur des barges et des péniches et expédiés pour l’essentiel à Paris.



Dans les massifs des Etroitures, du Long Rocher et du Restant du Long Rocher se trouvaient de grandes exploitations, ouvertes dès les années 1820. Et, afin d’évacuer plus rapidement les quantités énormes de pavés débités, les entrepreneurs eurent l’idée de faire construire une petite ligne ferrée à voie étroite sur plan incliné, ouverte en 1837. Une fois taillés, les pavés étaient chargés dans des wagonnets stationnés en haut de l'amas rocheux en exploitation. Les wagonnets étaient ensuite descendus le long de la pente sur une distance de 900 m environ à l'aide de câbles actionnés par une machine à vapeur. Puis les pavés étaient transbordés sur des charrois jusqu'au canal du Loing. De là, ils étaient embarqués sur des bateaux à destination de la capitale. On trouve de nombreuses traces du remblai de cette voie ferrée, ainsi qu’un départ de pont maçonné le long de son ancien tracé dans la parcelle n° 546.

Le déclin

Toujours à la pointe des révoltes ouvrières au cours des âges, notamment, peu après la révolution de 1830, les carriers ont été le fer de lance de l’insurrection de Fontainebleau, lors de la révolution de février 1848.

En 1848, Paris décida de se fournir en pavés produits dans sa proche banlieue Sud, ainsi que dans les Ardennes françaises et belges ; ce qui eut pour résultat de diminuer fortement la production belifontaine. Cette diminution de la production, en plus de la forte concurrence du grès des Ardennes, réputé plus résistant, et du granit (ou granite) de Bretagne, entraîna dans les années 1880, la fermeture de bon nombre d'exploitations. Enfin, dès 1850, l’utilisation de l’asphalte pour le recouvrement des chaussées sonne le glas de l'industrie des carriers.


Les plaintes incessantes contre l’exploitation du grès déposées par les peintres de Barbizon, des artistes, puis des premières associations de protection des massifs rocheux et de sa forêt, finirent par décider les autorités locales à interdire par un arrêté publié en 1907, l’extraction du grès dans tous les massifs du domaine de l'ancien bornage Royal. La poursuite du commerce de la pierre fut encore autorisée dans les parcelles privées situées autour des Trois Pignons, du Coquibus et de la plaine de Chanfroy. Mais un arrêté de 1982 interdit définitivement toute exploitation en ses nouvelles limites domaniales, rachetées par expropriation des propriétaires locaux, ou récupérées à l'Armée. La dernière carrière, située au Coquibus, ferma définitivement en 1983. Une carrière a cependant été ouverte en 1987 sur le territoire de la commune de Moigny-sur-Ecole et deux autres étaient encore en fonction il y a quelques décennie en Essonne du coté de Videlles les roches.



Un métier rude avec une espérance de vie courte !

Si quelques forçats ont bien œuvré sur des chantiers de taille de la pierre en forêt de Fontainebleau ; et notamment dans les environs de la plaine de Chanfroy et autour du Long Rocher, le métier de carrier est plutôt une véritable profession...

La technique consistait principalement à enfoncer des coins de bois dans des interstices naturels (les sillons) ou ébauchés à l'aide d'outils, dans le banc de grès à découper. Ils devaient ensuite être mouillés constamment, afin qu'ils gonflent et finissent par la faire éclater en gros blocs, appelés "mortaises" ou "boites à coins". À l'aide de masses et de coins en fer, ces mortaises étaient ensuite transformées en sections plus petites, pour être finalement débitées, soit en pavés, bordures de trottoirs ou en éléments pour la construction.






 1 3


1 : Finition d'un pavé au ciseau dans un baquet rempli de sable, afin d'amortir les chocs 2 : Division d'un gros bloc de grès 3 : Creusement d'un trou à l'aide d'une barre à mine frappée à la masse, afin d'y placer de l'explosif pour faire éclater la roche

À la fin du XVIIIe siècle et au début du XIXe siècle, cette méthode fut remplacée par une autre plus rapide, qui consistait au remplacement des coins de bois par l’utilisation de grosses masses en fer tenues à deux mains, qui frappaient de gros coins métalliques en appui sur la roche. Un ouvrier aguerri pouvait débiter plus de 12 000 pavés par an.




 3 et 4 : Barres à languettes (ou coins éclateurs) Photos : Th. Szubert

Il y a peu dans un abris bien caché, on trouvait encore des outils...

A partir du XIXe, au Rocher du Long Boyau, du Cuvier Châtillon et au Mont Saint-Germain, les grandes entreprises utilisèrent des explosifs en barres (poudre noire) afin de pouvoir arracher de gros blocs de grès aux fronts de tailles. Les ouvriers pratiquaient des trous cylindriques de trois à quatre centimètres de diamètre, sur une profondeur de trois à quatre mètres dans la roche avec des barres à mines. Puis on y insérait l'explosif muni d'une mèche longue. On complétait le bouchage du trou à l'aide de bourres et de silice. On allumait ensuite la mèche pour faire éclater la roche. Plus tard, l'utilisation d'explosifs se généralisa sur les parties du massif forestier encore autorisées à l'exploitation des carrières.





La vie des carriers était particulièrement difficile, ces hommes travaillaient jusqu’à 14 heures par jour, six jours par semaine, d’un labeur particulièrement harassant et pour un salaire de misère. Pauvres parmi les pauvres, vivant en marge de la société, ces malheureux, souvent alcoolisés étaient, au bout de quelques années passées sur les chantiers, atteints par la silicose, causée ici par la poussière de grès accumulée durant des années dans leurs poumons lors de l’extraction de la roche. Leur espérance de vie dépassait rarement les 45 ans ; alors qu'elle se situait autour de 60 ans pour d'autres professions à la même époque.





Il existait également une autre catégorie d'ouvriers, celle des saisonniers. Il s'agissait soit : de paysans de la région, qui travaillaient dans les carrières en période de saison morte à la ferme. Ces fermiers pouvaient quelquefois être les propriétaires des terrains exploités. Soit : des Cheminots ou vagabonds de passage, qui louaient leurs bras pour quelques semaines ou quelques mois dans les exploitations de la pierre de grès.
Au cours des années 1920, devant la pénurie de main d'œuvre autochtone dans les zones encore autorisées pour l'extraction du grès, les entrepreneurs, pour compenser le manque de personnels, durent engager de nombreux travailleurs issus de l'immigration, et presque essentiellement des italiens fuyant le régime fasciste de leur pays.


Sur leurs chantiers, les carriers devaient la plupart du temps fournir leur propre matériel pour la taille. Ces outils indispensables à l’exercice de leur profession, étaient leurs biens les plus précieux. L’achat d’une seule masse neuve équivalait à près de deux semaines du salaire moyen d'un ouvrier dans les années 1850. Aussi, après leur labeur, beaucoup d'ouvriers laissaient leur outillage -trop lourd à porter- en le cachant sur place dans de petits abris creusés à cet effet. Mais malgré ces précautions, les vols d’outils dans les chantiers n’étaient pas rares à cette époque, comme l’attestent les nombreux procès verbaux de plaintes déposées à ce sujet.




Je reviendrai sur ce sujet longuement dans le livre à paraître en 2016...

Connaissez-vous l'histoire de la Caverne aux Brigands des Gorges d'Apremont ?

Quel visiteur n'a jamais entendu parler de la Caverne aux (des) brigands ?


Située dans les Gorges d'Apremont, non loin du village de Barbizon, elle se découvre en suivant le sentier bleu Denecourt n°6. 


Son histoire mêle légende et fait dramatique. Voici donc un petit tour d'horizon des différentes publications autour de cette célèbre roche de notre patrimoine pour en savoir un peu plus. La caverne des brigands est donc située sur la parcelle 713. Il s'agit d'un passage sous la platière sommitale aménagé et élargi par Claude-François Denecourt probablement en 1844, date de son apparition sur les cartes forestières notamment celle dressée par Denecourt et Hardy en 1844). Denecourt, personnage atypique créateur des premiers sentiers touristiques (mais pas le seul) ne s'arrêtait pas à l'aménagement de ses sentiers. Il batissait autour des éléments les plus remarquables de véritables légendes quand celles-ci n'existaitent pas. C'est ce qui fit ici et, selon sa légende, sous le règne de Louis XV, la grotte aurait servi de repaire à une bande d'assassins, dont le chef était un dénommé Tissier.
Aisément accessible, elle constitue depuis cette époque un lieu très fréquenté de la forêt. Le limmonadier qui exploitait la buvette installée tout autour sur la platière était probablement le seul à connaître l'histoire de cette légende et on peut s'interroger s'il n'avait pas compris avant l'heure les principes du marketing ! Créée en 1857, la buvette sera exploité jusqu'à la Seconde guerre mondiale mais un petit chalet, en bas de la pente a pris le relais !

A cette époque, la forêt était aussi exploité par des guides, rémunérés aux pourboires, et qui, comme en montagne, avaient leur carnet de courses où les visiteurs inscrivaient leurs éloges ou reproches (pratique signalée de 1910 à 1950).
Aujourd'hui, le lieu est plus tranquille mais reste très fréquenté les week end. L'entrée de la grotte s'est partiellement comblée et il est devenu presque impossible de sortir par la deuxième issue... (à priori ce n'est plus le cas, voir dans les commentaires de l'article)




Mais l'histoire rattrape parfois les légendes ! En 1937, la grotte devient une véritable scène de crime, celui du meurtre de Janine Keller par Eugène Weidmann. Un meurtrier devenu célèbre car il est le dernier condamné à mort français à être exécuté en public le 17 juin 1939.

Un lieu si célèbre ne pouvait bien évidemment échapper aux photographes du début du XXe siècle et l'on trouve donc de nombreuse cartes postales de l'endroit.
Outre cette histoire, un autre ouvrage parle de cette drôle de Grotte. Il s'agit d'un livre rare : , édité en 1878, par Jules Hetzel !


Jules Hetzel (1814-1886) est, comme Denecourt, un précurseur. Editeur, photographe et auteur à ses jours, c'est à lui que l'on doit les premières publications périodiques pour la jeunesse ! Il s'associa avec Jules Verne avec qui il créa le "magasin d'éducation et de recréation -journal pour toute la famille-" sous le nom de "J.P. STAHL". Cette collection avait pour objectif la parution régulière d'ouvrages divers classés par genres et par tranches d'âges des lecteurs.
Pour Les Petits Robinsons de Fontainebleau, Hetzel, fit exécuter par Méaulle (célèbre pour ses illustrations des "Travailleurs de la mer" de Victor Hugo,) des gravures d'après ses propres clichés de la forêt de Fontainebleau (à l'époque, les plaques photographiques ne pouvaient pas servir à l'impression !) Ces clichés comptent donc parmi les plus anciens de cette forêt avec ceux de Cuvelier (1974).

Comme beaucoup d'auteurs de l'époque, Hetzel misait très certainement sur la célébrité des paysages de Fontainebleau pour assurer le succès commercial du livre. En voici quelques extraits... :






"Avertissement (de l'auteur)
Le but des auteurs de ce petit livre n'a pas été seulement de raconter les aventures de Pierre et de Jean dans la forêt de Fontainebleau, mais de tirer parti de ces aventures mêmes pour faire passer sous les yeux de nos lecteurs les points les plus remarquables de la célèbre forêt. Pour y arriver, il n'a pas toujours été possible de suivre un itinéraire logique, Pierre et Jean auraient eu trop à faire si leurs courses avaient dû les conduire partout à la fois dans la même journée, dans une forêt qui ne comprend pas moins de 8o kilomètres de circonvallation et 200 myriamètres de routes, chemins et sentiers se croisant, s'entremêlant et se dirigeant dans tous les sens.Ce n'est point la carte en main qu'on suivra un itinéraire qui est forcément de fantaisie et n'a pu tenir aucun compte des distances réelles.
Ce qui n'est pas de fantaisie, c'est`d'une part le fond même de la petite histoire que nous offrons à nos jeunes lecteurs, et ce qui est vrai d'une incontestable vérité, c'est la représentation des vingt-deux points de la forêt que, nous mettons sous leurs yeux. Ils ont été gravés, par M. J. Méaulle, deux d'après deux compositions de Bodmer et vingt d'après des photographies prises sur nature dont nous pouvons certifier l'exactitude.
STAHL .


Chapitre XVI
Il faut leur rendre cette justice qu'ils prirent leur course comme si leurs jambes n'avaient eu jusque-là aucune fatigue à endurer. Arrivés à cent pas de la chaîne des rochers qu'ils avaient en vue, Pierre déclara à Jean qu'il apercevait un grand trou,, une grande excavation dans les roches, et que, pour le coup, ils pourraient bien avoir à eux tout seuls une grotte cent fois; plus belle que celle que Robinson avait jamais pu découvrir dans son île.
Mais il y avait entre eux et Robinson cette différence que personne ne pouvait disputer à Robinson l'usage de sa grotte dans son île, puisqu'elle était pour de bon déserte, tandis qu'à l'entrée de leur future caverne les deux enfants aperçurent soudain, et non sans épouvante, un grand homme a grande barbe et de très-mauvaise mine, qui tout d'un coup s'était posté à l'entrée comme pour la barrer à tout autre.
Un homme de cet aspect là ne pouvait bien sûr être qu'un malfaiteur ; les deux enfants terrifiés ne pensèrent plus à rien sinon à se dérober à sa vue, et contournant les rochers d'un mouvement rapide, ils prirent à revers les fameuses grottes d'Apremont car tout nous porte à croire que ce sont ces grottes-là qui donnaient asile à l'homme à air farouche qui les avait tant alarmés, et que le brigand de Pierre et Jean n'était autre qu'un braconnier surpris comme eux par ce déluge.



Chapitre XIX
Marie le regarda avec un air de surprise qui se changea en une sorte de colère quand elle les eut reconnus.
" Je pleure, leur répondit-elle d'une voix brève, je pleure parce que les deux plus méchants écoliers de mon père se sont enfuis de leur maison et que mon père a voulu se joindre à leurs parents pour battre la forêt et les retrouver. Tout le pays est en émoi rien que pour eux. Les gens qui sont à leur recherche et mon père qui est à leur tête sont convenus qu'après avoir fouillé jusqu'ici ils se retrouveraient, à une heure qui est à présent bien passée, près de l'entrée de la caverne des Brigands. Inquiète pour mon père parce que l'orage était dans l'air, j'ai obtenu de lui d'aller l'attendre au rendez-vous. Il y a deux heures que je l'attends ; s'il n'est pas là, lui toujours si exact, c'est qu'il lui est arrivé malheur. Voilà pourquoi je pleure, et vous savez la faute à qui si j'ai une raison pour pleurer."
Pierre et Jean baissèrent la tête devant ces reproches mérités. Mais Pierre sentit que la seule manière de bien montrer son repentir, c'était de tout faire pour réparer sa faute. Il obtint de Marie quelques explications sur le chemin qu'avait pu suivre M. Patoche et se mit en route avec Jean, très-décidé à le ramener à sa fille.
En les voyant partir, la pauvre Marie remua la tête de l'air d'une personne qui n'espérait rien de tels auxiliaires.
" La pluie a rendu les rochers glissants, se disait-elle. Père, qui ne craint jamais rien, aura été trop prompt, trop hardi. Pour qu'il ne soit pas là quand il sait que je l'y attends, il faut qu'il ait fait une chute grave. Ah ! si je ne lui avais pas promis de ne pas bouger d'ici, il y a longtemps que je serais à sa recherche."
Malheureusement les pressentiments de la pauvre Marie ne l'avaient pas trompée. Pierre et Jean n'avaient pas fait deux cents pas de l'autre côté des rochers qu'ils aperçurent le corps inanimé de M. Patoche au pied d'un grand rocher (la Roche qui pleure).


Chapitre XXII et fin
Cinq minutes après, M. Patoche arrivait non pas dans la charrette, mais porté à bras sur une litière. Pendant que Pierre et Jean étaient allés prévenir Marie, les gens de .Bois-le-Roi, le père et la mère de Pierre qui croyaient .rejoindre M. Patoche à la caverne des Brigands, l'avaient rencontré bien embarrassé de se hisser sur la charrette, et tous avaient déclaré qu'il valait mieux qu'il fit le trajet sur une litière, où il n'aurait pas à craindre d'être secoué comme il l'eût été en voiture. On remercia le brave charretier .et on s'achemina, en passant par Barbizon, vers Bois-le-Roi.
Pierre et Jean suivaient en pleurant M. Patoche qui ne parvenait pas à les consoler.
" Non, non, s'écriaient-ils à qui mieux mieux, si vous souffrez, c'est notre faute!
- Si Nous vous corrigez, répondait le brave M. Patoche, je remercierai Dieu de m'avoir envoyé, mon entorse."
Au bout d'un mois, M. Patoche, qui les avait eus pour gardes-malades, s'applaudissait de la conduite de ses deux élèves. Il affirmait au père de Pierre que son ; fils et son neveu seraient chacun à sa façon, de braves garçons, en quoi il ne se trompait pas. Pierre ne pense plus à être Robinson, il ne menace plus Jean de le traiter, comme un Nègre ; mais son amour des bois lui est resté il est devenu un de nos plus célèbres paysagistes, et Jean est à l'heure qu'il, est le fermier le plus huppé de la contrée. Il aime la terre pour la cultiver et les bois pour les aménager et en tirer de bons produits - en quoi il ne faut pas le blâmer - car si l'art est beau, l'industrie est utile. C'est à chacun de ne pas se tromper sur sa vocation et d'aller soit à l'un, soit à l'autre, selon ses aptitudes.





Sources (sélection) :
dictionnaire historique et artistique de la forêt de Fontainebleau / Herbet, 1903 en ligne sur le site de l'AAFF.
Fontainebleau : une forêt de légendes et de mystères / Hervet et Mérienne, 2004.
Guide Joanne, 1857, 1910.
Guide bleu, 1950.
Les petits Robinsons de Fontainebleau / par Hetzel, illustré par Méaulle, 1878 en ligne sur le site de l'AAFF

Les abris et bivouacs de Fontainebleau : un patrimoine historique menacé !

Après l'article de la TL2B sur les carrières et les carriers de Bleau, il nous faut évoquer le patrimoine qu'ils ont laissé derrière eux et tout particulièrement les abris.

On en profitera pour parler aussi (un peu) des bivouacs des randonneurs et alpinistes mais rappelons dès maintenant, que ces lieux sont aussi fragiles que dangereux.

Nous ne donnons pas leur localisation afin d'éviter toute dégradation ultérieure. Merci de les respecter...

Sur les lieux de leurs chantiers, les carriers se construisaient des cahutes en pierre ou en bois. Si celles en bois ont toutes disparues, les abris de pierres sont encore bien visibles. Ils pouvaient avoir différentes formes, suivant la fonction que l’on voulait leur donner.



On peut trouver trois types de constructions sur les sites :

- les abris sous roche non fermés, (type auvents),

- les abris sous roche fermés de repos,

- les loges pour longs séjours.

Photo de Thierry Szubert
La plupart du temps, l'espace de vie dans ces "habitations" est assez petit et bas, afin de permettre de réduire l'espace à chauffer. Il faut noter que beaucoup d'abris avaient leurs ouvertures situées sur les versants des platières et des massifs rocheux le plus exposé au soleil. Si certaines loges ont des entrées étroites ou des couloirs d'accès difficiles, cela permettait sans doute de protéger le logis des visites impromptues de sangliers et de protéger l'huis des bourrasques de vent.

Dans de nombreux abris, l'on peut voir des gravures, des dessins et des peintures sur leurs parois. Il s'agit de représentations plus ou moins allégoriques : humaines, animales et autres, ainsi que des signatures, dates, petits écrits, moult figures et signes énigmatiques. Si certaines de ces représentations ont été réalisées par des carriers, la majeure partie d'entre elles ont été faites par des professionnels de la forêt et des "touristes" ; dont bon nombre postérieurement à l'époque d'exploitation des carrières.

Dans certains abris cachés et bien conservés ont trouve encore des outils semblant attendre le retour des ouvriers !

Après la fermeture des carrières, les abris, abandonnés par leurs anciens occupants, tombèrent rapidement en ruines, faute d’entretien et à cause du vandalisme. Bon nombres de ces abris furent ensuite transformés et occupés par les randonneurs et grimpeurs jusqu'à l'interdiction des bivouacs en 1942 par l'occupant. Au fil du temps, certains de ces abris étaient devenus de véritables "résidences secondaires", qui possédaient -outre des cheminées- des portes ouvragées avec serrures, (quelquefois fermées à clef), des fenêtres, dont certaines étaient munies de vitres et de volets, ainsi que du mobilier intérieur. L'alimentation en eau pouvait être assurée par des systèmes de récupération des eaux de pluie.


 Le Bivouac vert en 2015 possède encore ces fenêtres. Merci de ne pas les casser !




Dans les Trois pignons, après le rachat par l'état des anciennes propriétés privées, nombre de ces habitations sauvages devenues "illégales", furent détruites sur demande des autorités.

Certains abris présentent effectivement de gros risques d’effondrement sur leurs visiteurs ! 
Ainsi, les bivouacs connus de tous comme ceux du Potala, du Diplodocus ou du Rocher Cailleau, présentent tous des cheminées très instables dont nous recommandons l'élimination. D'ailleurs l’ONF a murer certains bivouac (comme à l’Ouest de Bourron-Marlotte ou Larchant), pour "éviter les accidents et les incendies éventuels" que pourraient provoquer une occupation par des "campeurs".

Exemples au Rocher du Potala

Bivouac simple sous rocher avec cheminée
L'entrée
C'est bas de plafond mais suffisant (l'âtre au fond)
Gravures modernes...
Le grand bivouac est sale et dangereux
Étagères, au fond la couchette à droite ce fut l'âtre
Ces mêmes bivouacs lors de leur saccage en 1995
Ils avaient quand même bien organisé la chose !


Certains bivouacs, bien cachés, restent fréquentables et préservés grâce à quelques grimpeurs, randonneurs, et autres passionnés, qui restaurent et entretiennent ces témoins d’un passé au fond pas si lointain. 

Selon les sources, resterait entre 140 et 200 de ces refuges encore en bon état aujourd’hui dans tout le massif forestier… Heureusement mais comptez pas sur nous pour vous donner leur localisation !

Architecture :


Les simples abris sous roches (ou auvents) :


Ils étaient utilisés pour se protéger de la chaleur ou de la pluie, ranger les outils, et mettre la nourriture et les réserves d’eau au frais pendant la journée de travail. Le plus souvent, ils sont construits sous un auvent naturel formé par un amas de rochers mais peuvent avoir fait l'objet d'une petite excavation et d'aménagements simples comme des marches, ou un murets partiels.

Nous avions présenté sur la TL2B un exemple de ces abris qui semblait avoir été aménagé pour les besoins de la forge.

Les petits abris de repos :


Ils sont construits sous roche, ou bâtis en murs, (voire sous tumulus). Ils sont généralement étroits et bas de plafonds n'étant destinés qu'à abriter les carriers pour le "casse-croûte" et les pauses notamment en hiver. Ils pouvaient être ouverts sur un côté ou bien fermés par des portes. Ils étaient conçus pour abriter de deux à quatre personnes, qui se tenaient assises sur un banc en bois ou en pierre. Ils sont le plus souvent équipés d'une cheminée (souvent minuscules) situées au niveau du sol, et quelquefois à hauteur des genoux ou des épaules des personnes assises. Certains possédaient des niches pour le rangement.


Les abris habitables (ou loges) :


Lorsque la "veine d’exploitation" se trouvait trop éloignée du lieu de leur domicile, les carriers construisaient des édifices plus élaborés, qui permettaient une occupation permanente pour un séjour plus ou moins long. Ils possédaient une porte, voire des fenêtres, et possédaient, bien entendu, une cheminée, des niches pour le rangement, un ou plusieurs bas flancs en bois ou bien en pierre pour le couchage. Certains couchages sont par ailleurs assez élaborés, remplis de sable, couverts de fougères. Le sol pouvait -pour plus de confort- être dallé, planché, paillassé ou recouvert d'humus...


Thierry Szubert, l'un des meilleurs spécialistes des carrières et des abris de carriers de la forêt de Fontainebleau, a aussi découvert les vestiges de grands abris de forme rectangulaire et de plusieurs mètres de longueur (jusqu'à quatre mètres). Ces abris étaient en partie creusés dans le sol et montés en pavés sans liants. Il les a baptisés "cantines", car selon lui, il semblerait que de part leurs surfaces importantes et leurs situations, ils devaient être utilisés pour la prise de repas en commun de plusieurs ouvriers et pour des réunions de travail ou bien encore à l'occasion de grands événements comme la fête de Saint-Roch. Un constatation faite également près d'anciennes carrières de grès de la vallée de l'Essonne et dans la Vallée de Chevreuse.

Carrière. À gauche, grande cabane construite avec des pavés -d'apparence- cimentés. Peut-être une "cantine"

Thierry Szubert
On peut aussi voir, ça et là, des ruines de cabanes de forme carrée, rectangulaire ou arrondie, construites intégralement en murs ou en appui contre un rocher. Les murs, étaient faits de pavés empilés les uns sur les autres et non maçonnés. Ces petites constructions pouvaient être enterrées jusqu'à la hauteur de la toiture, aux trois quarts, à moitié ou édifiées au niveau du sol, sans aucune fondation. Les toitures devaient être faites de chaume, de tôle, de planches, de toile goudronnée. La plupart de ces abris, de par leur fragilité, due au non maçonnage, n’existent plus qu’à l’état de vestiges plus ou moins visibles ; sauf pour quelques rares exemplaires, qui ont été remontés par des bénévoles. Certains d'entre eux qui se trouvait au Rocher Fourceau ont été massacrés par les engins forestiers lors de la coupe qui suivit l'incendie. un sujet que nous avions abordé dans cet article.

Enfin, certains abris étaient creusés dans la terre et recouverts par un tumulus, formé d’un mélange de sable, de caillasse et de terre, enrobant une ossature faite de pavés montés en dôme. Ce type d'abri possédait un étroit couloir d'accès extérieur, qui s'enfonçait jusqu'à l'entrée souterraine de la chambre. Ce passage était protégé de chaque côté, par un muret de soutènement. D'autres abris étaient constitués autour d’une avancée de roche ou creusés dans la roche elle même, qui faisait office de toit, et murés de pavés sur les faces ouvertes. ils pouvaient également être creusés dans le sable, sous une veine, avec souvent des marches d’escaliers pour pénétrer dans la chambre.


Tunnel avec grande cheminée à droite
Photo de Thierry Szubert


Gestion de l'eau

Dans les anciens chantiers, au détour d'un rocher, on peut rencontrer des sortes de marmites creusées dans la roche. L'eau étant assez rare dans les massifs de Fontainebleau, les ouvriers creusaient des vasques destinées à recevoir l'eau pluviale, qui leur servait ainsi de réserve. On peut en trouver d'assez profondes.


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Pour la forge



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1 et 2 : Vasques creusées dans la roche

3 : Vasque avec bouchon d'évacuation4 : détail du bouchon

5 : Réservoir d'eau taillé dans un bloc de grès ; peut-être utilisé par le forgeron du chantier pour refroidir les outils travaillés à la forge


Nous vous invitons à préserver ce patrimoine et à signaler vos découvertes à l'AAFF dont la commission carrière a ouvert un blog en 2012 qui semble enfin s'alimenter de nouveaux articles ! Merci les amis parce qu'on avait hâte d'en savoir un peu plus !